Un appel téléphonique. Se présente: Marie. Une voix posée me raconte les détails sur le bref mais tumultueux parcours du jeune cheval Daïkiri. Cheval trop puissant, difficile à gérer sous la selle. Tout cela me parle de réparation et (ré)éducation par l’Ecole de Légèreté.
Un cheval donc, le cheval de ses rêves, qui, encore bébé, a commencé sa vie en box et ne l’a pas supportée, qui a été pris d’ulcères graves, suivis de nombreux soucis de santé. Elle a tout fait pour lui, elle a fait appel à des gens de renom pour le garder, pour le soigner, pour le dresser… Elle a été trahie de tous côtés. Il a été trahi de tous côtés. Involontairement sans doute, par méconnaissance non pas du cheval, mais de ce cheval. Un simple numéro parmi les autres… ou vraiment l’incapacité à voir en lui autre chose qu’un animal dénué de sensibilité, je ne sais. Le résultat est là: le cheval a failli mourir, la cavalière aussi. Bon…
Donc, bon, ben j’y vais quoi. On va voir ce qui est réparable, ce qui est irréparable mais modifiable, et ce à quoi je ne pourrai pas toucher… C’est avec des pincettes que j’arrive chez eux. Je leur souhaite tellement de bien déjà! Si seulement je pouvais leur apporter cela…
En arrivant je vois la situation. Elle lui a offert non seulement de quoi vivre (c’était pourtant mal engagé), mais carrément de quoi vivre heureux.
Ils sont désormais l’image du bonheur, il n’y a plus qu’à réintroduire la possibilité de l’équitation dans leur couple. Qu’il cesse de devenir dangereux potentiellement juste parce-qu’il ne sait pas ce qu’on attend de lui, d’une certaine manière.
Deux séances sont passées désormais. Daïkiri se prête bien au jeu. Il est un peu surpris de mes demandes. Elles ne sont pas compliquées. Mais je ne monte pas sur son dos (je vous épargne les détails des selles non adaptées et des sangles trop petites! de toute manière, cela aurait été prématuré, vraiment!). Il doit se concentrer au lieu de jouer. Il doit petit-à-petit laisser sa tête entre mes mains, puis laisser sa bouche se faire guider par mes mains. Il doit suivre ensuite au pas les mouvements de mon corps sans m’écraser, tandis que je guide sa tête ici ou là. Et ma foi, l’inquiétude de la première séance n’est plus là. Il ne comprend pas tout, surtout sa gestion de l’équilibre latéral, mais qu’est-ce qu’il progresse pourtant!
Sa connaissance des actions de la main est extrêmement archaïque, pour ne pas dire anecdotique. Il lui manque du savoir pour être serein ensuite sous une selle… C’est que c’est pas si simple, de se laisser guider, si on ne comprend même pas la langue dans laquelle on nous parle, hein! L’Ecole de Légèreté apporte cela. Une base de dialogue claire, avec des mots inculqués, puis des phrases, dites par nos mains, nos jambes, notre assiette…
On finit par réussir à peu près des fléchis droits aux deux mains sur la ligne droite, des tourners dans le pli (avec le meneur en-dedans ou en-dehors de la courbe) et le contre-pli. Des amorces d’extensions d’encolure, des arrêts, des déplacements d’épaule…
Rien encore de bien construit, juste des amorces, parfois une volte complète, parfois quelques pas, peu importe, on insère doucement la confiance, la rigueur, la progressivité, la brièveté, les récompenses, la sérénité… On s’installera sur des demandes plus longues et plus construites prochainement. Inutile de brusquer: ça, il sait déjà ce que c’est…
Bientôt la troisième séance. Je me réjouis de les retrouver!