Quinto a tout le loisir de flairer sa selle avant d’être harnaché, en broutant du foin.
Quinto a tout le loisir d’espérer une friandise à chaque fois que j’arrive par sa droite, ou que je le harnache.
Quinto sait qu’il a une friandise durant le harnachement, et que s’il s’inquiète, mes gestes se ralentissent, voire s’arrêtent, attendant son accord pour reprendre leur cours. Alors il donne son accord et attend la friandise.
Quinto a eu le loisir de redécouvrir qu’être sellé n’est pas synonyme d’être monté.
A présent, Quinto se place tout seul à côté du montoir (promontoire) et sait qu’aussitôt en place sur ce montoir, je lui offre une friandise en passant par-dessus son dos, en m’appuyant sur sa selle, tel un sac à patates.
Quinto ne se tient plus figé par la trouille, tétanisé, prêt à sauver sa peau dans cette immobilité malsaine. Non, Quinto espère, se ploie, cherche la main qui se tend avec son lot de grain.
Quinto au pire s’inquiète un petit peu quand le pied se met à l’étrier, hausse les sourcils quand la selle fait du bruit sous mes frottements exagérés, monte un peu la tête, dans un vieux geste conditionné. Mais c’est vite oublié car Quinto a un travail sérieux qui demande de l’application maintenant: il doit attraper la nourriture dans la main qui se tend, sans bouger un sabot et sans pincer ladite main; cette délicate et difficile contorsion est vachement plus intéressante que d’avoir peur d’une personne… qui ne monte même pas sur la selle!
Quinto, en se plaçant de lui-même près du montoir, décide de me placer à sa gauche ou à sa droite: il est acteur de son éducation. Il semble préférer un débourrage à droite qu’une rééducation à sa gauche, si on l’écoute. Et on l’écoute, sans abandonner la rééducation pour autant: j’ai bien l’intention de lui faire accepter les deux.
Quinto tolère de plus en plus qu’on lui touche les oreilles, mais cela reste encore un effort conséquent pour lui de se contrôler. Cependant, il accepte de ramener sa tête vers moi alors que je lui touche l’oreille car Quinto sait que faisant cela, il gagne une friandise.
Moralité: Quinto n’est pas près d’être maigre! 🙂
[Edit 2015: Quinto est passé par des phases de régressions violentes à pied, se sensibilisant tout seul à des gestes anodins, et revenant sans cesse sur cette angoisse, étant tour à tour super aux ordres et confiant, super aux ordres et terrorisé, pas du tout aux ordres voire échappé dans la terreur. J’ai donc décidé de ne pas m’occuper de monter, il a épuisé mon capital de bonne volonté, et j’ai préféré l’abandonner auprès de compagnons de paddock en me disant qu’il irait mieux en n’étant jamais sollicité et juste caressé. Que la vie uniquement auprès de chevaux le poserait. Cela a été le cas… mais il a terriblement maigri. Et n’a pas repris d’état, alors que les analyses de sang étaient ok, les dents ok, le vermifuge ok, nourriture ok, traitement anti pyro et lepto au cas où ok, les manip ostéo ok, etc. Totale déprime pour lui, dégout de la vie… C’est, heureusement pour lui, Marie qui l’a récupéré chez elle, elle qui l’a toujours aimé, et il a repris de l’état rapidement. Un cas vraiment vraiment à part ce bonhomme…]