Jaya et théories éducatives

Jaya est arrivée dans son beau licol, emmenée par Philippe et son van tout confort. Déposée dans un box, et laissée là en attendant que ma journée soit plus calme, et que la jument se fasse aux lieux. Orion puis Mélodie lui ont tenu compagnie dans le box d’à côté.

En essayant d’être exhaustive:

– Jaya ne se laisse pas approcher au pré suffisamment pour qu’on puisse lui passer un licol.
(donc: les gestes de la mise du licol lui paraissent dangereux, elle ne supporte ni les mouvements ni le contact; en fait, s’en échapper lui donne le sentiment sincère d’avoir encore une fois sauvé sa vie)

– Jaya a repéré le véhicule du maréchal et est encore plus méfiante quand celui-ci arrive.
(donc: le peu de fois où ce véhicule est arrivé, des choses désagréables à ses sens lui sont arrivées – dont la mise du licol, d’ailleurs)

– Jaya vient prendre les friandises dans la main mais ne se laisse pas toucher au point qu’on puisse lui passer un licol
(donc: elle fait bien la distinction entre les gestes humains sans danger pour elle, et ceux qu’elle considère comme délétères)

– Jaya a été travaillée en longe en carrière et arrache la longe des mains du longeur qui était pourtant un homme expérimenté
(donc: elle a pris assez d’expérience et de force pour pouvoir se libérer et bien qu’il l’ait toujours rattrapée, elle trouve bénéfique de se libérer malgré tout régulièrement de cette présence à son goût ‘trop longtemps trop près’)

– Jaya a même fini par tirer au renard en cassant tout plutôt que laisser faire les gestes de la mise du licol alors qu’elle est déjà licolée, attachée, et a préalablement été touchée sur la tête sans défense notable de sa part.

Bref, Jaya a terriblement restreint son avenir de cheval d’humain, alors que l’humain ne l’a a priori jamais maltraitée au sens où nous l’entendons.

Elle fait partie de ces chevaux qui, lorsqu’ils ont eu peur de quelque chose, sans avoir subi aucun désagrément de cette chose, se disent quand même : “Ouf, heureusement que je me suis méfié, ça m’a sauvé la vie! la prochaine fois, je serai encore plus méfiant, puisque c’est ce qui m’a permis de rester en vie”.
Et petit à petit, ce cheval s’auto-dresse à devenir ‘raide dingue de trouille’ dans des situations totalement anodines (pour nous).

Bon… Quand on a déjà tout essayé en matière de douceur et progressivité, qu’on n’a pas envie de passer une année à lire quotidiennement dans le parc la collec complète de Victor Hugo, de Jules Vernes, des aventures de l’Etalon Noir, tout en priant pour que le cheval finisse un jour par mettre son licol tout seul de lassitude, et que la situation s’aggrave pourtant avec le cheval…

… une des solutions: lui faire affronter sa peur sans plus trop lui demander son avis.

Lui laisser ce choix qui n’en est pas un: aller vers ce qui était source d’angoisse, ou vivre une situation encore plus désagréable.

Et que son cerveau se conditionne enfin dans le sens souhaité par nous:
Aller vers ce qui faisait peur = tranquillité psychologique et/ou physique.
Fuir ce qui fait peur = mouvements (ou bruits, ou…) désagréables permanents
Donc tension psychologique.
Donc recherche de calme.
Donc recherche de ce qui faisait peur pour revenir enfin à la sérénité.

Mais pour ce faire, si vous n’avez pas eu le déclic tout seul jusqu’ici, surtout, demandez l’aide d’un professionnel! Et d’un professionnel (ou personne pleine de tact donc très réactive) rompu à ces méthodes, sinon, ce sera presque à tous les coups le même échec… en pire.

Chaque millième de seconde perdu lorsque vous ne cèderez pas assez vite ou trop vite, sera une catastrophe bien plus grande que tous vos échecs jusqu’alors.
Au plus on met de pression, au plus il faut être rapide dans la réaction pour indiquer au cheval quel comportement nous convient et lequel ne nous intéresse pas.
Autrement, on dresse le cheval à sélectionner des gestes techniques très fins et à les fuir avec plus de dextérité encore, condamnant à l’échec les professionnels suivants qui auraient la gentillesse (ou la folie?) de bien vouloir vous prêter main forte…

Nuno Oliveira disait: ‘Le drame, en équitation, c’est que le cheval a toujours des réactions plus rapides que l’homme.’
Le grand homme… comme cela est juste! (et pas très très français, mais c’est excusable, c’est une traduction du portugais).

Si le cheval fait un geste moins pire (encore faut-il l’avoir perçu, vite, et avoir réagi avant même qu’il ait compris qu’il avait fait un truc bien):
=> cession de nos gestes à nous… et de tout le corps, pas un muscle ne doit rester tendu, la triche, ça vaut pas avec les chevaux; ou recul de notre part pour ôter la pression, très rapidement sans brusquerie.

Si le cheval maintien un geste inadapté
– comme fuir rapidement (une fuite plus lente doit être récompensée; hé si! vous voyez, mieux vaut faire appel à quelqu’un qui sait; surtout que peu après, on ne récompense plus la fuite identiquement lente, mais on récompense une fuite encore plus lente puis seulement un arrêt de fuite)
– comme aussi monter l’encolure ou crisper les flancs ou tenir le regard loin de nous:
=> maintien de nos gestes (quitte à les ralentir si ils aggravent trop la réaction du cheval) ou maintien de la distance entre lui et nous (prévoir du sucre et de l’arnica pour nous si le cheval est libre dans un parc!)… avec cession dès que le cheval freine sa fuite ou minimise sa défense.

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2 pensées à propos de “Jaya et théories éducatives

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